Dimanche, 28 novembre 2010 à 11 : 30
Vendredi, 26 novembre 2010 à 23 : 29
(Elle murmure, comme son pouls murmurait) Tou-toum. Tou-toum. Un avion à dix-mille pieds.
Tou- toum. Une traînée de fumée blanche qui disait qu'un garçon pensait à moi, un brun ou un
blond, un roux jamais, les roux ne pensent pas aux filles, ils se demandent comment faire
pour devenir bruns ou blonds. Tou-toum. Il fait un temps magnifique. (Elle se met à
danser, doucement, en fermant les yeux) Personne ne danse comme moi. Les loups de Tex
Avery. Les Chinois. Les goélands. Eugène Boudin. Personne. L'été, je prenais le temps de
vivre. Je marchais sur la digue Nord. J'étais seule.
Dans ma tête, je comptais les personnes à qui j'aurais pu dire : je t'aime. Là, tout de suite,
comme ça. Et je n'avais pas assez de doigts pour compter, alors mon coeur était grand.
J'accélérais le pas. J'accélérais, à cause de mon coeur. Mes rêves. Mes rêves, je les notais
dans un autre cahier. Ou alors des histoires vraies, tellement vraies qu'elles ont l'air de
rêves qu'on a mis sur terre.
Il fait un temps magnifique. Je ne vois pas grand monde sur la digue Nord. Je regarde le ciel. Je prends mon pouls. Encore une langue pendue pour me dire que je suis belle. J'éclate de rire.
Ça fait bouger la terre sur son axe. Rien que ça. C'est l'été. Je prends mon temps. Je n'ai pas assez de doigts.
Mon coeur est grand. Mon coeur est — Voilà.
Ce soleil-là, sur la digue Nord.
Fabrice Melquiot
Jeudi, 14 octobre 2010 à 14 : 59
Elles cheminent, sinueuses, se frayent une route et fendent l’air; s’étendent et s’étendent à l’infini, étirent et multiplient leurs bras à leur guise. Tout autour, l’univers tente d’user de son pouvoir... Et la pluie, et les tempêtes, et le tonnerre: autant de déferlements qui font frémir les branches amies. D’un coup, l’une cède, et c’est à l’autre de resserrer son étreinte. Certaines subissent l’usure, marquent la fatigue de l’âge. D’autres encore fleurissent à peine, respirent du neuf; là où richesse de l’expérience et fragilité du jeune âge mêlent leurs petits poings, s'enlacent entre elles. Les branches prennent des allures de barrages, de barrières à l’opposant. Mais les branches préfèrent leurs costumes d’invitation, et d’ascension, toujours plus grande. Elles se croisent, se décroisent et s’entremêlent. Elles se suivent sagement, et lorsque l’une d’elle se sent l’audace de prendre son indépendance, c’est à son tour qu’elle crée un autre chemin : un nouveau lien.
C’est se prétendre arbre que de se sentir ancré dans la terre pourtant légère, que de se sentir encré de sève dorée.
Jeudi, 2 septembre 2010 à 13 : 00
A dire vrai la magie dissimulée se trouvait ailleurs, dans quelques mots gribouillés sur la fenêtre de ma voiture; le coeur en question se trouvant n'être qu'un morceau d'aluminium qui se reposait, fatigué, sur l'asphalte; un morceau de papier-miroir devenu amour grâce aux passages mobiles et à la météo capricieuse.
Nous nous sommes regardées en souriant très fort, elle a dit "comme quoi quand on cherche..."; j'ai ajouté "on trouve.".